Piet Moget

Piet Moget est né le 28 mai 1928 à La Haye. Bien que fils unique, il fait partie d’une communauté importante. Sa mère est l’aînée de onze enfants et son père est également issu d’une famille nombreuse. Il vit dans un milieu familial modeste, solidement structuré où la notion d’art est très présente.
À l’âge de huit ans, il joue de l’accordéon et s’immerge dans la peinture (il peint des assiettes en guise de cadeaux de Noël).
En 1937-38, il fait la connaissance du peintre Jan Blockpoel qui travaille dans la tradition de l’École de La Haye proche de celle de Barbizon. Il sera son premier maître. Piet l’accompagne dans ses déplacements sur le motif, portant ses couleurs. Il observe, peint lui-même.
En 1941, à force de rôder autour de l’école des Beaux-Arts de la Princessengracht et à la suite de diverses démarches il est admis, à l’âge de 13 ans, aux cours libres, parmi des adultes. Il est le premier élève admis si jeune. L’enseignement est académique et les professeurs sont tournés vers la peinture de l’École de La Haye. Piet Moget fréquente le Gemeente Museum où il voit des peintures de Mondrian. En 1941-42, accompagné de sa mère, il voit une exposition de Jan Sluijters où dit-il, Il verra ce que l’on peut faire avec la lumière.
Il vend sa première toile, La Rue, lors d’une exposition à Voorburg en août 1942.
Durant les années de guerre, Piet Moget travaille dans la tradition hollandaise, sous l’influence de l’École de La Haye. Il s’essaie à plusieurs techniques : peinture à l’huile, aquarelle, dessin au crayon et au fusain. Il expérimente la couleur, allégeant progressivement sa palette vers des tons plus irisés ou s’essayant à des couleurs plus franches et plus contrastées. Il peint la réalité des paysages hollandais, ceux-là même décrits par les maîtres du Siècle d’or.
À la fin de la guerre, il voyage en Europe, notamment en France où il séjourne pendant six mois.
À l’automne 1946, il entre à l’école des Beaux-Arts de La Haye. Il a comme professeurs Madame Giacometti qui lui enseigne l’histoire de l’Art, Paul Citroën, lié à Dada, au Bauhaus et au Blaue Reiter, Drayer qui est dans la lignée de la Nouvelle Objectivité. Piet Moget ne sera pas influencé par ces courants ni par le cubisme. En revanche il est attiré par Monet et surtout Pissaro comme le montreront les peintures réalisées à Saint-Rémy-de-Provence lors d’un séjour en 1948. Il fonde, en 1947, avec d’autres étudiants, le Contakt Groep qui organise des expositions, des débats d’idées, des discussions sur l’art, la poésie, la littérature et la politique.
En 1947, il séjourne à Port-de-Bouc dans les Bouches-du-Rhône puis découvre la lumière du Languedoc et de la Catalogne. Il visite la région narbonnaise, les étangs de Sigean et Port-la-Nouvelle.
1947 est aussi marquée par un événement déterminant dans la vie et le travail pictural de Piet Moget. En février est présentée au Gemeente Museum de La Haye l’exposition «De Bonnard à nos jours» où il découvre un tableau de Geer van Velde, La Méditerranée, peint l’année précédente. La peinture l’impressionne profondément : Cette œuvre apport(ait) un message d’espoir et de sérénité.En 1948, il voyage en Provence. Moget, en quête de lumière et d’effet de transparence, semble rechercher inspiration et modèle dans l’impressionnisme.
Il porte déjà un intérêt particulier pour le thème du quai, du canal (qui deviendra majeur à la maturité), des étendues liquides.
En 1951, il épouse le peintre Mary Schallenberg, amie d’enfance et des Beaux-Arts. Il partent en Suède travailler et exposer.
1952, ils s’installent définitivement en France à Port-la-Nouvelle, au mas de la Grange Basse où ils vivent dans des conditions très précaires, sans eau ni électricité. Ils retourneront chaque été jusqu’en 1955, en Scandinavie où naîtra leur fille Layla.
Cette même année, il fait la connaissance de Geer van Velde en lui rendant une visite impromptue chez lui à Cachan. C’est le début d’une longue amitié. Van Velde et sa femme Elizabeth viendront plusieurs fois à la Grange Basse où Geer travaillera et exposera. Piet le considère comme son «père spirituel».
En 1956, apparaissent des couleurs plus nacrées, plus irisées. Le contour des formes est moins accusé, la ligne d’horizon de plus en plus présente, le ciel prend plus d’importance. «À partir de 1956 environ, Piet Moget prend l’habitude d’aller peindre sur le quai à Port-la-Nouvelle avec une petite camionnette. Un jour dans sa camionnette en train de lire le journal, il regarde par la fenêtre et voit avec une extrême intensité ce qu’il a sous les yeux. En fait peu de choses. Une digue avec de gros blocs de pierre, en avant l’eau du canal reflète ces blocs, au-dessus de la digue on devine la mer, le ciel [...]. Tout à coup c’est comme si l’on voyait pour la première fois. Ces moments peuvent être extrêmement intenses, et parfois marquer un avant et un après dans la vie.» Il plante dorénavant son camion chevalet, rempli de toiles en cours, sur les quais de Port-la-Nouvelle tous les matins au même endroit avant que le soleil ait dissipé les brumes matinales et là, sur le motif, car il reste un peintre de plein air, il interroge la lumière et l’espace. Le thème central de sa peinture devient le canal, la digue, la mer, l’espace.
Parallèlement à son travail de peintre, Piet Moget organise des expositions d’autres artistes. Il débute cette activité dès 1952 en Scandinavie où il expose les œuvres d’artistes européens contemporains. De 1956 à 1964, il organise «Les Rencontres» qui seront le premier pôle d’art contemporain créé en Languedoc-Roussillon. Ces manifestations rassemblent des œuvres de Geer van Velde, Bissière, Staël, Vieira da Silva, Estève, Lapicque, Lanskoy, Poliakoff, Tanguy, Léger, Les Cobra et bien d’autres. Il collabore également à la création de pôles d’art contemporain à Sérignan, à Béziers (expositions de Jacques Villon, J. Miró), au château de Jau, au musée Fabre de Montpellier, au musée Rigaud de Perpignan.
En 1991, il fonde le L.A.C., au hameau du Lac sur la commune de Sigean dans un ancien chai transformé. Piet Moget va y installer cinq grandes salles consacrées à la diffusion de l’art contemporain, dans un cadre extrêmement dépouillé, à l’accrochage et à l’éclairage très sobres. Deux expositions ont lieu chaque année, au printemps et en été, parfois en automne autour de jeunes créateurs.