LOUIS CANE

Ces peintures peintes à partir d’un souvenir d’enfance - la vision de bocaux de sucres d’orge alignés sur les étagères de l’épicerie. De l’œil au bout de la langue… Une sensation gustative produite par la brillance et le reflet des couleurs derrière le verre. La « peinture abstraite » est ici dans son « élément » : pas de narratif, ni de représentation figurative, juste la représentation de sensations et d’émotions contenues sur la surface du tableau. Le châssis que l’on voit en transparence, et dont on devine qu’il tend le grillage enduit de résine, compose une profondeur. Celle-ci n’est pas créée par une perspective avec point de fuite comme dans la peinture figurative, mais plutôt par l’espace et le volume d’air en suspension derrière la surface de la toile. L’emploi de la résine, avec son extraordinaire particularité de dilution des couleurs, s’est révélé être une réelle invention formelle qui correspondait aux effets plastiques « gustatifs » que je cherchais à reproduire. En ce sens, on pourrait aussi écrire de ces tableaux qu’ils sont de « l’air coloré ». Deux sculptures dialoguent avec les peintures : Véhicule libéllo tracté (2014) - en plexiglas transparent et résine - transporte avec lui une boite d’aquarelles, la marinière du pilote évoque volontiers Picasso. Le voyage sera long … Mais il y a des libellules de rechange. Quant à la Sorcière sur son balai (2015) bricolée avec du bois de bambou, des durits en plastique transparent teintés en jaune, elle exprime la volonté de « désocler » la sculpture. Louis Cane