Nam Tchun-Mo

Gesture in Lines

20 avril - 04 juin 2022

Nam Tchun-Mo

Gesture in Lines

20 avril - 04 juin 2022




 

L’atelier de Nam Tchun-Mo se situe au cœur de ces paysages sans qualité. Pour s’en faire une idée, il suffit de regarder le dernier film de Lee Chang-dong, Burning (2018). Il me semble que l’on a rarement filmé ce paysage-là avec autant de justesse.

 

L’atelier est organisé comme un outil performant de production et de stockage. [...] La dimension artisanale de cette production n’a rien d’anecdotique. Comme dans toute activité de cette nature, il faut être attentionné et organisé. Les choses s’élaborent patiemment. Le temps, toujours, est au cœur du processus de production. Nous sommes là aux antipodes d’une création spontanée, rapide, impétueuse, d’un geste lyrique ; tout est pensé, réfléchi, mesuré ; quasi industrieux, jamais industriel. En effet, rien de systématique dans cette production, la main est là, qui veille à ce que le geste, bien que sous contrôle, conserve une certaine latitude. Une fois encore, tout se joue entre ce qui est maîtrisé et ce qui échappe ; un espace ténu, quasi imperceptible, où l’œuvre advient, échappant au devenir-objet auquel l’atelier aurait pu la destiner, ou la contraindre. C’est à cet endroit-là, difficile à identifier, à nommer, à circonscrire, que les choses se tiennent. Cette difficulté à appréhender fait aussi la qualité de cet œuvre difficile à situer, à moins de l’enfermer dans des catégories impropres à en dire la singularité. La tentation pourrait être grande de convoquer une certaine histoire de l’abstraction, à la fois construite et géométrique. Les noms de certains mouvements et de certains artistes viendraient assez vite… Tel un obstacle ! Je me garderais bien de les nommer. D’une part, pour éviter, autant que faire se peut, toute lecture européo-centrée. Si Nam Tchun-Mo, à l’instar de ses contemporains coréens, connaît parfaitement l’histoire de l’art occidental, jusque dans ses manifestations les plus récentes, il tire aussi son art, et son regard, d’une tradition et d’une pensée plus locale. Il n’oppose pas les traditions ; il ne tombe pas non plus dans une forme de syncrétisme. Il convoque, autant que de besoin, des œuvres, des paysages, des pensées, d’ici et de là, pour les besoins de son art, et selon la voie qu’il a choisi d’emprunter. Ce n’est ni un art international standardisé, ni un art folklorique local. C’est, comme tout art véritable, un art hybridé, métissé, complexe : un art impur. Et doublement ! C’est-à-dire dégagé de cette fiction autant sur un plan formel que sur un plan plus philosophique. Nul essentialisme dans cet art-là. La ligne est claire sans être autoritaire. Ce n’est pas un art sentencieux. L’artiste ne l’est d’ailleurs pas davantage. 

Olivier Delavallade, extrait de Expansesin Beam, Lines, Spring, Stroke, Hartmann Books, 2019.
 




Artiste de l'exposition : Nam Tchun-Mo


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