Ted Gahl et André-Pierre Arnal
20 juin - 26 juillet 2024Ted Gahl et André-Pierre Arnal
20 juin - 26 juillet 2024
Dans un monde de plus en plus artificiel, l'imagination technologiquement augmenté crée des attentes nouvelles et spectaculaires. Cependant, malgré les possibilités impressionnantes du numérique, les paysages cybernétiques ne pourront jamais tout à fait simuler les spectacles qui se déploient sous nos yeux, car l’expérience majestueuse de la nature est irremplaçable : les étendues d'eau cristalline continuent de scintiller à la lumière du jour. Au cœur du printemps, le feuillage reste vert et insatiable, tout en s’approchant du précipice l'évolution. Et le soleil, avec ses rayons éblouissants, continue de projeter des ombres fantomatiques sur des terres laissées à l’abandon. C'est à partir de ces visions fantastiques que l'artiste New Yorkais Ted Gahl fait émerger le surréalisme de notre quotidien, convoquant un langage abstrait qui semble particulièrement attaché aux cycles de la vie organique.
Dans cette exposition duale, Ted Gahl et André-Pierre Arnal, présentée à la galerie Ceysson Bénétière du 20 juin au 26 juillet, Gahl rend hommage aux processus analogiques à l’œuvre dans le monde naturel mais aussi dans l'histoire de l'art, ravivant la curiosité pour la matière au cœur du mouvement français Supports/Surfaces. Arnal est un artiste emblématique de cette tradition postmoderne née à Paris et dans le sud de la France. De 1969 à 1972, le groupe d'artistes composant ce mouvement a travaillé de manière collective, contre la marchandisation individualiste de l'objet d'art et de son créateur. Le collectif s’employa à démystifier le caractère précieux de la peinture elle-même au profit de l'expérimentation matérielle. Il n’était pas rare que les artistes de Supports/Surfaces abandonnent le châssis pour voir comment la toile libre pouvait interagir avec les murs nus. Des artistes comme Arnal se sont également employé à déconstruire le plan visuel classique. Comme le montrent les œuvres exposées, le peintre pliait souvent des tissus blancs ondoyants en sections linéaires pour peindre ensuite ces pans de tissu à la bombe de motifs géométriques minimalistes. Évoquant l’iconographie sobre des drapeaux et les bannières, ces compositions audacieuses éclatent de couleurs chaudes et vives.
Dans ce dialogue contemporain avec l’approche abstraite originale d'Arnal, Gahl utilise les éléments fondamentaux du médium pour proposer des œuvres figuratives abstraites éthérées. En décrivant cette interaction visuelle, Gahl s’ouvre à la possibilité de faire cohabiter ses figures humaines avec les aplats de couleur méditatifs d'Arnal. L'artiste laissent de côté les fioritures habituelles du surréalisme, échangeant les pigments électriques hyper-saturés pour des teintes miraculeuses produites par la nature. Au moyen de coulées imprécises et de couches d’acrylique dégoulinantes, l'artiste représente des paysages oniriques et des rêveries évanescentes.
Ces scènes ésotériques et paysages aériens sont parcourus de figures fantomatiques telles des apparitions hantant ces terres inconnues. Parfois, ces êtres translucides flottent au milieu d’étendues d'eau d’un bleu sombre, entourés de teintes muettes dans les tons de gris et vert-olive. Cependant, une lumière étincelante émane d’œuvres comme Stuck in Corridor (figure). Ici, l'œil distingue la silhouette d'une figure sans tête vêtue d’une robe verte : le bas de la toile semble irradier d’un jaune nostalgique rappelant la luminosité sépia de l'heure magique avec ses éclats auburn. Mais tandis que la figure est réverbérée par cette chaleur, des coups de pinceau noirs comme de l’encre serpentent autour de cette forme énigmatique, comme pour souiller sa vitalité métaphysique et nous ramener à la dureté du réel.Tout au long de cette exposition, avec tact et pénétration, Gahl ne cesse de flirter entre l'obscurité et la lumière, l'abstraction et la figuration, l'organique et le synthétique.
Dans cette conversation intergénérationnelle avec Arnal et son approche primale de la peinture, le retour à l'expression analogique de Gahl marque le renouveau d’une expérimentation audacieuse que l’on pourrait comparer au fait de prendre une photographie à l'aveugle, sans avoir l’assurance immédiate d’avoir saisi la bonne image. Pour Gahl et Arnal, il s’agit de graver, plier et déformer la toile vierge : sculptant à l’eau et au pigment, ces deux artistes nous dévoilent l’harmonie intemporelle de la couleur, de la forme et de la composition.
Artistes de l'exposition :
André-Pierre Arnal
Ted Gahl
Informations Pratiques
Ceysson & Bénétière
956 Madison Avenue
10021 New York
T: +1 646 678 3717