Wilfrid Almendra
Wilfrid Almendra
Né en 1972, à Cholet, France.
Vit et travaille entre Marseille, France et Casario, Portugal.
Dans le travail de l'artiste Wilfried Almendra, idées et matériaux sont inséparables.
Son vocabulaire formel est issu de l'architecture, des formes et des surfaces avec lesquelles nous nous entourons. Les matériaux qu'il utilise proviennent le plus souvent de l'économie alternative, du troc et de l'échange. Ils mettent en tension des questions liées aux classes sociales, au désir de confort et à la capacité individuelle d'invention et de poésie trouvée au coeur des choses les plus normatives.
Formation
2000 École des Beaux-arts de Rennes, Rennes, France
1999 École des Beaux-arts de Lisbonne, Lisbonne, Portugal
1998 Academy of Fine Arts, Manchester, Royaume-Uni
Guillaume Mensart : Quand tu présentes ton travail, il t’arrive de commencer par dire qu’avant d’être artiste tu as été entrepreneur. En quoi cette origine signe-t-elle une position, une manière de produire et d’envisager le travail, et ton rapport au monde de manière générale ?
Wilfrid Almendra : Tout d’abord, j’ai suivi une formation professionnelle. J’ai obtenu un CAP et un BEP, puis un bac professionnel en maintenance industrielle. J’ai une relation aux choses avant tout technique, c’est ce que l’on m’a transmis. C’est donc en partie dans la fabrication que se joue ma relation aux matériaux. Quand j’ai commencé ma pratique artistique,je m’appuyais beaucoup sur ce rapport à la matière et sur le pouvoir que j’avais à la transformer. Après, c’est vrai que je suis devenu entrepreneur quand mon père m’a cédé sa société. Si j’en parle, ce n’est pas juste anecdotique, mais parce qu’il y a dans l’entreprise un rapport au travail qui m’intéresse. Quand j’ai pris cette décision cornélienne d’entrer en école d’art, je me suis dit «je vais changer de tout au tout, je veux être artiste». Mais dans mon esprit, un artiste était quelqu’un qui travaillait comme un ouvrier. Quelqu’un qui se lève, embauche et fait ses huit heures... Je n’avais pas cette relation romantique à l’objet d’art. Cette manière d’envisager ma pratique à travers le travail fait encore partie de ma culture aujourd’hui.
GM : Il y a dans ton œuvre quelque chose de très subjectif, qui n’est pas seulement de l’ordre de l’affirmation d’un point de vue, mais qui tient aussi, de manière très concrète, dans les matériaux que tu utilises et qui sont souvent chargés d’histoires personnelles. Je pense par exemple au bois de châtaignier de ta maison familiale au Portugal dans une sculpture, au verre cathédrale que tu déploies dans plusieurs pièces récentes. L’origine de tes matériaux amène non pas du récit mais du réel. En quoi cela est-il important pour toi ?
WA : J’ai en effet utilisé du bois de châtaignier provenant de la porte de ma maison familiale au Portugal dans une pièce de la série Killed in Action (Case Study Houses) qui faisait référence aux premières expérimentations autour de la maison individuelle industrielle aux États-Unis. Le programme Case Study Houses a été lancé après-guerre. La revue Arts & Architecture avait diffusé un appel à projet auprès d’architectes tels que Richard Neutra, Pierre Koenig ou encore Charles et Ray Eames, les invitant à concevoir de nouvelles maisons individuelles, peu coûteuses, pouvant être répliquées facilement et suivant un cahier des charges préconisant l’utilisation de matériaux et de technologies développés pour la guerre. Ce programme a eu un réel impact sur l’histoire de l’architecture et plus particulièrement de l’habitat individuel. Pour la série, je me suis intéressé plus précisément aux dix projets non construits et j’ai réalisé non pas des maquettes mais des bas-reliefs. Killed in Action (Case Study Houses) parle d’une utopie du modernisme. Je voulais interroger le devenir de ces maisons en prenant en compte les mutations de leur environnement.
GM : C’est en ce sens que tu as utilisé des éléments marqués par le temps?
WA : La question du devenir m’intéresse. Cela implique d’utiliser des matériaux porteurs d’une histoire, comme par exemple des cache-poteaux recouverts de champignons qui proviennent d’une maison témoin laissée à l’abandon. Ces œuvres recèlent une mémoire. Le bois de châtaignier que tu évoques est directement lié à mon histoire personnelle. J’ai ramené cette porte d’entrée de la maison familiale en pensant à mon père qui très jeune a quitté le Portugal pour s’installer en France où il s’est acheté un pavillon dans lequel j’ai grandi. C’était alors une forme d’aboutissement pour lui.
GM : Quel regard portes-tu sur l’industrie pavillonnaire ? Cette espèce de mépris ou de condescendance qu’on rencontre la plupart du temps quand il s’agit de tourner son regard vers ces territoires est complètement étranger à ta façon de l’appréhender...
WA : J'ai vécu dans ce genre d’environnement. J’ai vu ces maisons, je les ai éprouvées, utilisées, usées. Il n’y a rien de cynique dans le regard que je porte sur ces zones pavillonnaires et sur les gens qui les habitent. Je ne porte pas de jugement, je dirais plutôt que j’ai de l’empathie. J’ai utilisé des éléments provenant des premiers pavillons construits pour les ouvriers de l’usine Michelin à Cholet, qui à l’époque était le plus grand employeur de la région. Le temps et l’usure donnent une réelle qualité esthétique à ces objets et ces matériaux mais, si je les choisis, c’est d’abord parce qu’ils sont imprégnés de mémoire et de l’histoire ouvrière dont je suis issu. Les compositions de mes œuvres sont parfois très formelles, colorées, mais il y a toujours dans ces compositions un tas de réseaux souterrains. Tout cela est très poreux. Ce n’est pas explicite mais ces œuvres sont tendues par ces histoires.
GM : Peut-on dire que tes matériaux posent la question du politique ?
WA : En quelque sorte oui, la question politique est posée mais elle n’est jamais imposée. Je parle du monde ouvrier, de l’habitat, de la projection de leur existence. Quand tu vis dans une banlieue ou dans un quartier pavillonnaire, cela impose une façon d’être, d’exister, de te donner à voir au monde. Par exemple, j’ai toujours observé avec intérêt les «devants» de maison. C’est un espace particulier qui se trouve entre le public et le privé, ce seuil sur lequel tu montres qui tu es ou qui tu aimerais être. Certains sont arborés et paysagés, d’autres présentent des ornements ou des sculptures. Ce sont des espaces de représentation, des vitrines. Tu imposes publiquement une image de toi. Cette démonstration est très politique.
GM : Il est aussi question d’économie parallèle dans ton travail? De troc, de réseau d’approvisionnement parallèle...
WA : La transformation et l’utilisation du déchet ont toujours fait partie de ma manière de produire. Quand j’habitais Cholet, mon atelier était à côté d’une décharge industrielle. Je récupérais des matériaux, les manipulais, les bricolais. L’économie parallèle est permanente dans mon travail. Les gens m’intéressent, j’aime travailler avec les autres. Par exemple, j’ai collaboré avec un potier qui, dans son rapport aux choses, était assez proche de moi. Ensemble nous surproduisions. Lui comme moi n’aurions jamais pu faire seul ce qu’on a fait ensemble. J’ai aussi travaillé avec des ramasseurs de champignons, des gens du bâtiment. On vient de la même couche sociale, on parle la même langue. Et ça me permet d’aller plus loin. Quand ça marche et qu’il y a de la confiance, cette matière peut produire des choses incroyables.
GM : Et l’économie de tes projets...
WA : J’aime m’appuyer sur des économies alternatives. Ces économies de trocs, d’échanges, de partages qui appellent le langage, se discutent, avec tout ce travail de rencontres. Le troc vient après. Assez naturellement, tu sais ce dont ont besoin les gens. Pour les Concrete Gardens, j’adoptais un rapport plus immédiat quand je récupérais des sculptures dans les jardins: j’allais directement proposer d’échanger une vieille statue contre une nouvelle, ou contre des cartouches de cigarettes, des bouteilles de whisky. C’était un peu radical parce que c’est justement le deal qui m’intéressait.
Wilfrid Almendra, Paris
19 octobre - 02 décembre 2023
Expositions personnelles
2022
Adelaïde, commissaire d'exposition : Muriel Enjalran, FRAC PACA, Marseille, France
Adelaïde, commissaire d'exposition : Sofia Lemos, Panorama - Friche de la Belle de Mai, Marseille, France
2020
So Much Depends Upon a Red Wheel Barrow, Atlantis Lumière, Marseille
2017
Light Boiled Like Liquid Soap, commissaire d'exposition : Setra Adam-Couralet , Palais de Tokyo, Paris, France
2016
Light Boiled Like Liquid Soap, commissaire d'exposition : Nicolaus Schafhausen et Alexetra McIntosh , Fogo Islet Arts, Canada
2014
Between, the Tree et Seeing It, Les Églises, Centre d'Art Contemporain de Chelles, Chelles , France
2013
L'Intranquillité, Centre d'Art Passerelle, Brest , france
Reconstruction of a Monument II, Village Royal, Paris , France
Matériologique, commissaires d'exposition : Zoë Gray, Fondation d'Entreprise Ricard, Paris , France
Le Splendid, Parc Saint Léger, Centre d'art contemporain, Pogues-les-Eaux , France
Second skin III, Maison du Barreau, Paris , France
2012
Yellow River, Bugada & Cargnel, Paris , France
2010
Second Skin, L'Antenne du Plateau, FRAC Île-de-France, Paris, France
2009
Killed in Action (Case Study Houses), Bugada & Cargnel, Paris, France
Wilfrid Almendra, - Go, FRAC des Pays de la Loire, Carquefou, France
Wilfrid Almendra - & Return, Zoo Galerie, Nantes , France
2008
Or Something Like That, Maison du livre, de l'image et du son François Mitterret, Villeurbanne , France
Jungle Composite, La Chapelle des Calvairiennes, Mayenne , France
Cuts Across the Let, Bugada & Cargnel, Paris , France
2007
Goodbye Sunny Dreams, Buy-Sellf Art Club, Marseille, France
Watercolors, Le Gret Atelier, École Supérieure d'Art, Clermont Ferrand, France
2006
Rock Garden, FRAC-Collection Aquitaine, Bordeaux, France
2005
De natura, Centre d'Art Contemporain de Meymac, Meymac , France
Expositions collectives
2022
Sors de ta réserve #1, FRAC Ile de France, Komunuma, Romainville, France
2017
Résonnance, Musée de la Reine-Bérengère, Le Mans, France
Maison Modèle, Radar, Caen , France
2016
Flatlet / abstractions narratives #1, commissaires d'exposition : Marianne Derrien et Sarah Ihler Meyer , MRAC, Sérignan, France
L'Esprit du Bauhaus, commissaires d'exposition : Olivier Gabet et Mathieu Mercier, Musée des Arts décoratifs, Paris, France
Festival Vis à Vis, commissaires d'exposition : Bright Lights. Big Cities, Paris, France
2015
La Chapelle Fifteen, La Chapelle des Calvairiennes, Mayenne, France
Yes to all, Treize, Paris, France
Weterer Above the Sea of Fog, Galerie Bugada & Cargnel, Paris, France
2014
The Other Sight, Contemporary Art Center, Vilnius, France
Let's Play, part of Playtime, Les Ateliers de Rennes, Biennale d'art contemporain, Galerie du cloître, Rennes , France
48°28'39"N 2°12'47"E, Les pierres se battent entre elles, commissaires d’expositions : Emmanuelle Day et Allison Somers , Auvers-Saint-Georges, France
The Brancusi Effect - The Archival Impulse, commissaires d'exposition : Vanessa Joan Müller et Nicolaus Schafhausen, Kunsthalle Wien, Vienne, Autriche
Festival des Arts éphémères, commissaire d'exposition : Gaël Charbau , Parc de Maison Blanche, Marseille Parapanorama, Palais de Tokyo, Paris, France
L'écho / Ce qui sépare, Hab Galerie, Nantes , france
2013
Des corps compétents (la modification), Villa Arson, Nice
Résidence secondaire, commissaire d'exposition : Gaël Charbeau , MAMO Audi talents awards, Marseille, France
Archeologia, commissaire d'exposition: 40mcube, FRAC Bretagne, Rennes, France
Vue d'en haut, commissaire d'exposition : Angela Lampe , Centre Pompidou, Metz, France
De belles sculptures contemporaines, Œuvres de la collection du FRAC Pays de la Loire, Hab Galerie, Nantes , France
This is (not) music, commissaire d'exposition : Richard Leydier, La Friche de la Belle de Mai, Marseille, France
Steel et Freedom, Otto Zoo, Milan, commissaire d'exposition : Lara Pan Châteaux Secrets, l'île des Embiez Fieldwork, Marfa, Texas, États Unis
La dernière vague, commissaire d'exposition : Richard Leydier, La Friche de la Belle de Mai, Marseille, France
2012
Skyscraper: Art et Architecture Against Gravity, Museum of Contemporary Art, Chicago , États-Unis
Prestige : Fantasmagories de notre temps, commissaire d'exposition : Julia Cistiakova, Palais d'exposition du Centre culturel de communication de Klaipeda, Lituanie
#11 The Flesh, Lage, Berlin, Allemagne
Rob Pruitt's Flea Market, La Monnaie, Paris , France
10'000 Hours., On Craftsmanship, Mastery et Failure in Art, Kunstmuseum Thurgau , Suisse
2011
C'est, l'amour à la plage, Musée d'art contemporain Languedoc-Roussillon, Sérignan , France
Making is Thinking, Witte de With, Rotterdam , Pays-bas
Wilfrid Almendra, Philippe Cognée, Casser la baraque, Galerie Mélanie Rio, Nantes, France
Exquises Esquisses, FRAC des Pays de la Loire, centre Athanor, Guérete, France
Écoutez voir!, Centre d'Art Contemporain, Pontmain, France
2010
America, Deserta, commissaires d'exposition : Étienne Bernard et Setra Patron, Parc Saint Léger - Centre d'art contemporain, Pougues-les-Eaux, France
First Ural Industrial Biennale of Contemporary Art, National Center of Contemporary Art, Ekaterinburg, Russie
Circuit céramique à Sèvres. La scène française contemporaine, Sèvres - Cité de la céramique, Sèvres , France
One Man's Mess Is Another Man Masterpiece, Galerie Bugada & Cargnel, Paris, France
Perpetual Battles, commissaires d'exposition: Maria Baibakova, Jean-Max Colard et Kate Sutton, Baibakov Art Projects, Moscou, Russie
Ever Prosperity, Galerie Bugada & Cargnel, Paris, France
Retour vers le futur, CAPC, Musée d'art contemporain de Bordeaux, Bordeaux, France
2009
3ème Biennale d'art contemporain d'Anglet, Anglet , France
Shadows of Forgotten Ancestors, Galerie Bugada & Cargnel, Paris , France
2008
Notorious, Le Plateau, FRAC Ile-de-France, Paris , France
Antidote 4, La Galerie des Galeries, Paris, France
Zones Arides, commissaire d'exposition : Patrice Joly Tucson Museum of Contemporary Art (MOCA), Tucson, Arizona, États-Unis
Échelle humaine, commissaires d'exposition : Galerie de multiples et Valérie Setoz, Maison du livre, de l'image et du son, Villeurbanne, France
2007
XS, , commissaire d'exposition : Elisabeth Wetterwald, Fondation Ricard, Paris, France
Série Noire, commissaire d'exposition : Frédéric Latherrade, Villa Bernasconi, Genève, Suisse
Dérive, commissaire d'exposition : Mathieu Mercier, Prix fondation Ricard, Espace Paul Ricard, Paris, France
L'Histoire d'une décennie qui n'est pas encore nommée, commissaires d'exposition : Stéphanie Moisdon et Hans Ulrich Obrist , Biennale de Lyon, Lyon, France
Basse déf, commissaires d'exposition: Nichoals Thély et Stéphane Sauzedde, Centre d'art OUI, Grenoble, France
Enlarge Your Practice, commissaires d'exposition : Jean-Max Colard, Claire Moulène et Mathilde Villeneuve, La Friche La Belle de Mai, Marseille, France
XS, commissaire d'exposition : Elisabeth Wetterwald , Galerie Espace Mica, Rennes, France
Space Oddity, Bugada & Cargnel (Cosmic Galerie), Paris, France
945 + 11, FRAC Aquitaine, Bordeaux , France
Slow Life, commissaire d'exposition : Yuu Takeisha, APT Gallery, Deptford, Royaume-Uni
2006
Zones Arides, commissaire d'exposition : Patrice Joly , Le Lieu Unique, Nantes, France
Zones Arides, commissaire d'exposition : Patrice Joly , Espace Paul Ricard, Paris, France
Aakey, CCC - Centre de création contemporaine, Tours, France
Slow Life, John Hansard Gallery, Southampton, Royaume-Uni
Hradacany, commissaires d'exposition : Alice Barbara, Yann Chateigné, David Cousinard et Thu van Tran, la Générale, Paris, France
Buy-Sellf Art club, Marseille , France
Est-ce bien de l'art ?, Abbaye du Ronceray, Angers , France
2004
35 h, Les Laboratoires d'Aubervilliers, France
It's Hip To Be Square, Zoo Galerie, Nantes, France
Buy Sellf, atelier d'artiste, Marseille, France
A ciel ouvert, Centre de création, Bazouges, france
2003
Black Block, Palais de Tokyo, Paris, France