10 ANS à Luxembourg

02 juin - 04 août 2018

10 ANS à Luxembourg

02 juin - 04 août 2018




 

Dix ans au Luxembourg: d'une dimension à l'autre

Qui aurait cru, il a dix ans, lorsque Bernard Ceysson et ses associés ouvrirent à Luxembourg une première galerie au Grand-Duché, après celle de Saint-Étienne, et avant celles de Paris et Genève, que celle-ci allait devenir le vaisseau amiral de l'entreprise? Dorénavant installé à Koerich, à proximité de la frontière belge, le lieu, avec ses 1.200 m² de surface d'exposition et les immenses murs blancs qui en sont le corollaire, a permis à la galerie de franchir une étape dans son mode de fonctionnement.

La dimension muséale du bâtiment vient en effet compléter l'offre programmatique des autres adresses, tout en réaffirmant une stratégie géographique mixant implantations périphériques (Saint Etienne, Luxembourg, Genève) par rapport aux grands centres d'art que sont Paris ou plus récemment New York où la galerie est aussi active.
Ce modèle unique en son genre permet d'accroître la (re)connaissance d'artistes français, tout en s'ouvrant largement à l'international avec la scène nord-américaine notamment.

On se souvient encore de la première exposition de Claude Viallat dans un local voisin mais déjà hors norme pour une galerie européenne, de quoi donner libre cours à l'ambition des fondateurs du lieu et aux souhaits des artistes, Outre Viallat, que l'on revit dans un dialogue pour le moins surprenant avec Messagier deux ans plus tard, on se remémorera les ensembles à caractère rétrospectif de Bernar Venet, Louis Cane, Noël Dolla, Erik Dietman et tout récemment Bernard Pagès,  sans oublier les  oeuvres inédites d'un artiste presque oublié en Europe francophone, Ulrich Ruckriem. Cette présence du sculpteur allemand constitue une des suites de ces grandes expositions thématiques de type muséal que permettent également ce type d'espace. On pense bien entendu à "Sculptures, Matières, Matériaux, Textures" (Foetz, 2016) consacrée aux œuvres tridimensionnelles ou à son pendant pictural "Diverses sont les lignes de la vie... Hölderlin" (Wandhaff, 2016). Figures historiques et artistes d'une plus jeune génération y étaient confrontés dans une ébouriffante exposition collective dans le premier cas, par une stimulante juxtaposition de courts ensembles monographiques dans le second. 

L'autre grand axe de la programmation rendu possible par cet espace industriel est le cycle d'expositions consacrées à la jeune scène américaine sous le titre "Feed the Meter". Les deux premières éditions (en 2015 et 2017) ont manifesté une fois de plus l'importance apportée par la galerie aux concepts de peinture et de sculpture et à la part déterminante que constituent la matière et la couleur dans l'art contemporain des deux côtés de l'Atlantique. Ce cycle a en effet aussi pour ambition de montrer la jeune peinture américaine en Europe, dans la volonté d'explorer les liens ténus ou manifestes entre les artistes fondateurs de Supports-Surfaces et une nouvelle génération, pour laquelle la dimension picturale reste primordiale.

Que plus d'une trentaine d'artistes soit invitée à l'actuelle exposition des dix ans, démontre également la richesse et l'éclectisme de la programmation de la galerie située à Luxembourg-Ville pendant de nombreuses années. Plusieurs artistes issus de la scène luxembourgeoise y furent exposés, comme d'autres dont les chemins divergèrent depuis, mais que l'on retrouvera pour cet événement.
C'est cet insatiable appétit de découvertes et de confirmations - que la nouvelle génération à la tête de l'entreprise ne renie pas -  allié à une connaissance approfondie et critique de l'histoire de l'art qui font de cette galerie, et plus particulièrement de son site luxembourgeois, une adresse hors norme. 

Bernard Marcelis